De la graine au bourgeon – Verakis partie 22

… Dans le domaine de la nutrition, si l’on examine l’évolution des messages véhiculés par les médias, on constate clairement l’influence des phénomènes de mode. C’est ainsi que dans le passé les rondeurs féminines étaient considérées comme charmantes. Aujourd’hui les femmes subissent la « dictature de la minceur » véhiculée par les médias. Ces mêmes rondeurs sont dorénavant détestées par les femmes et une minceur presque maladive fait partie du stéréotype de la femme idéale, comme en témoignent certains défilés de haute couture. Les journaux nous ont révélé récemment un cas extrême : celui d’une jeune femme top-modèle de 40 Kg pour 1,72 m, morte à vingt ans d’anorexie. Ce qui d’ailleurs n’empêche pas, comme on l’a vu plus haut, la prolifération des cas d’obésité.
De plus, la confusion dans la diversification alimentaire des enfants au cours de leur première année de vie s’appuye sur l’observation de nombreux nouveaux cas d’allergies alimentaires. Mais cette observation, une fois de plus, n’est pas vraiment fondée sur des recherches épidémiologiques, expérimentales ou pratiques. Certains croient que la diversification alimentaire doit être tardive en tant que prévention, laissant ainsi la place à une consommation de lait exclusive pendant une période peut-être un peu trop longue.
Le grand problème de ces phénomènes de mode c’est que leurs promoteurs s’appuient de plus en plus fréquemment sur des faits prétendument scientifiques. Ces références fallacieuses abusent le public qui se trouve ainsi entraîné, en toute bonne foi, à des habitudes alimentaires ou autres qui peuvent compromettre la santé.
C’est ici que nous pouvons évoquer la théorie de « la colonisation scientifique de l’ignorance » proposée par Jurdant (2006), qui signale que la vulgarisation scientifique aurait notamment pour effet de transformer l’ignorance du profane en la « scientifisant » c’est-à-dire en adaptant le questionnement initial du profane au savoir des experts. Cet effet accentue la dépendance du profane vis-à-vis du savoir des experts. Le profane perd la dimension subjective de ses propres inquiétudes.
La quête d’informations qui peut en découler, le besoin de « savoir », mettra la personne dans une position de « subalterne », de soumission tacite à l’avis du savant, à la parole de l’expert. Il serait donc colonisé par le savoir scientifique.
De ce fait nous pourrions ajouter qu’à partir de là, le profane en quête d’informations « scientifiques » deviendrait très perméable à des informations éventuellement trompeuses ou nocives, parce que semblant provenir de sources scientifiques rigoureuses mais qu’il est dans l’incapacité de mettre en question. On pense ici aux nombreuses « poudres magiques » qui font maigrir, à ces régimes miraculeux présentés dans de « décors » toujours renouvelés ou bien encore à ces régimes végétaliens draconiens que l’on impose aussi aux enfants.
La « preuve scientifique » est de plus en plus évoquée avec aplomb pour la promotion des produits alimentaires.
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Juliana T. Grazini dos Santos – Docteur en Information et communication, Nutritionniste, Créatrice de Verakis.
Ceci est le vingt-deuxième chapitre de la “saga” qui qui raconte les fondations de Verakis.
Lisez les chapitres antérieurs:
Source: Morceaux de l’introduction de la ma thèse de doctorat: “La science de la nutrition diffusée au grand public en France et au Brésil – Le cas de l’alimentation maternelle infantile. Thèse dirigée par Baudouin JURDANT
Imagem: Yanik Chauvin